Le
documentaire du réalisateur belge Thierry Michel, qui revient sur l’assassinat
de Floribert Chebaya, un militant congolais des droits de l’homme, a été
interdit le 26 juin. Le 2 juillet, cette censure a été levée. Le 4 juillet, le film a été diffusé au festival Ecrans noirs à Yaoundé. Retour sur un
feuilleton en plusieurs épisodes.
Episode
1
Le festival de cinéma
Ecrans noirs, dont la 17ème édition se tient à Yaoundé du 29 juin au
6 juillet, reçoit le documentaire de Thierry Michel et le sélectionne pour être
en compétition dans la catégorie Films étrangers. Les Ecrans noirs soumettent
ce film à la Commission nationale de contrôle des œuvres cinématographiques,
dite Commission de censure, parmi tous les films sélectionnés.
Episode
2
Le 26 juin, la
Commission de censure logée au ministère des Arts et de a Culture interdit la
diffusion de L’affaire Chebaya, un crime
d’Etat ? au Cameroun, sans aucune explication. Le film est retiré de
la programmation du festival Ecrans noirs. Pourtant, le film a été diffusé en
janvier dernier à l’Institut français du Cameroun à Yaoundé qui, lui, n’a pas
introduit de demande de visa auprès de la Commission de censure.
Thierry Michel |
Episode
3
Le 2 juillet, le site
de la Fédération africaine de la critique cinématographique, Africiné.org,
révèle l’interdiction du documentaire. Thierry Michel, qui devait arriver à
Yaoundé ce même mardi pour présenter son film, monte au créneau et accuse la
République démocratique du Congo (RDC) de faire pression sur le Cameroun pour
que son film ne soit pas diffusé. Un communiqué de Thierry Michel
précise : « Thierry Michel vient d'apprendre par le directeur du
festival, Bassek Ba Kobhio, la veille de son départ, mardi, qu'il serait
immédiatement refoulé dès son arrivée par la police des frontières, malgré un
visa en bonne et due forme délivré par l'ambassade du Cameroun à Bruxelles». Le
film avait déjà été interdit de diffusion en RDC et son réalisateur refoulé à
la frontière de Kinshasa en juillet 2012.
Episode 3
Dans l’après-midi du 3 juillet, les Ecrans noirs publient à leur tout un
communiqué. Dans ce document, le festival affirme que l’interdiction de
diffusion qui pesait sur le documentaire a été levée, après que le festival ait
introduit un recours gracieux auprès du ministère des Arts et de la Culture. «
Face au remue-ménage occasionné par des actions, communiqués et initiatives
menées ici et là, le festival se propose de diffuser le film dans un proche
avenir et dans un contexte plus apaisé, en présence du réalisateur »,
termine le communiqué de presse signé de Marcel Epee Mbody, le directeur du
festival Ecrans noirs.
Episode 4
Le 4 juillet au soir, L’affaire Chebeya, un crime d’Etat ?
a finalement été diffusé à l’Institut français de Yaoundé, dans la cadre de la
17ème édition des Ecrans noirs en présence d’une centaine de
festivaliers curieux et du directeur de la Cinématographie au ministère des
Arts et de la Culture. C’est le promoteur du festival,
Bassek Ba Kobhio lui-même, qui a introduit le film en ces termes : « Mais pourquoi voulait-on censurer ce film ?
La censure est une bêtise qui n’a plus de raison d’être. Je dis d’ailleurs à
Jean-Pierre Bekolo de demander le visa pour son film. S’il lui est refusé, nous
allons faire recours. Et si le film est censuré, au moins on en aura la preuve.
Nous, artistes, seront obligés de nous organiser en syndicat pour que pareille
publicité ne soit plus faite sur notre pays. Toute œuvre mérite d’être
vue ». L’affaire Chebaya, un crime
d’Etat ? du réalisateur belge Thierry Michel, est à nouveau en
compétition dans la catégorie film étranger.
Le public de Yaoundé a donc eu, pour
la seconde fois, l’opportunité de voir ce documentaire qui revient sur
l’assassinat de Floribert Chebaya, un militant congolais des droits de l’homme
retrouvé mort en 2010, et le procès qui s’en est suivi. Un procès qui met en
cause les services de la police au plus haut sommet de l’Etat. Avec des appels
forts qui ont pu inquiéter les fonctionnaires du ministère des Arts et de la
Culture : « Kabila, assassin au Congo, il a tué, nous demandons sa
démission immédiate », scandent les manifestants après la mort de Chebeya.
« Lorsque celui qui a la charge de sécuriser, c’est lui qui tue, nous nous
trouvons devant un crime d’Etat. Un pouvoir qui repose sur le sang ne doit pas
durer », clame pour sa part le prêtre qui célèbre la messe de requiem de
Fidèle Bazana, le chauffeur disparu de Floribert Chebeya dont le corps n’a
jamais été retrouvé.
Les commentaires du public ont
plutôt porté sur le rôle joué par le témoin camerounais, Gomer Martel, dans
l’affaire Chebeya. Lui qui se trouvait pour escroquerie dans les locaux de la
police au même moment que le défenseur des droits de l’homme.
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