Le regard critique d’un
enseignant-chercheur sur le Grand Prix des Associations littéraires décerné le
7 janvier 2014 à Yaoundé par le Club des Muses.
Francis Bebey, Grand Prix de la Mémoire aux GPAL 2013 |
Le 7 janvier
dernier s’est tenue à l’Institut Français de Yaoundé, une cérémonie de remise
des prix, annoncée à grand renfort de publicité par les journaux quotidiens et
les médias audiovisuels. Plusieurs associations littéraires ayant cru à cette
initiative, ont présenté à ce concours littéraire, plus de cinq cents livres
d’auteurs plus ou moins connus de la scène intellectuelle camerounaise, publiés
dans les derniers dix-huit mois, comme le stipulait le règlement dudit
concours.
Au final, le
« Grand Prix de la Mémoire » fut décerné à Francis Bebey ; dans
les deux autres catégories retenues (recherche et belles lettres),
l’organisateur fut le principal gagnant ! En violation du règlement qu’il
a lui-même écrit pour son concours, Eric Mendi le président de l’association
organisatrice de l’événement (Le Club des Muses) s’attribua éhontément le
« Grand Prix des Belles lettres » pour son roman intitulé
« Opération Obama », publié par une maison d’édition qui n’existe que
dans son imagination, car portant le nom de son association (Le Club des
Muses, association des belles lettres) !
Dans la
deuxième catégorie « Grand Prix de la Recherche », le lauréat désigné
fut Magloire Ondoa ; seul problème et grosse curiosité, le titre primé
n’était pas en compétition ! Le battage médiatique s’est fait autour des
67 volumes et 250 tomes de « Textes et Documents du
Cameroun (1815-2012) » alors que le jury a reçu pour examen « Introduction
historique au droit camerounais : la formation initiale, éléments pour une
théorie de l’autonomie des droits africains » ! Simple méprise ou
complicité d’escroquerie savamment organisée ? La réponse est
attendue !
L’ordonnancement
de la cérémonie de remise des lots fut en lui-même un cas de haute voltige dans
la fumisterie : le président du jury relégué au bout de la table, privé de
proclamer les résultats, réduit à serrer les mains des personnes appelées sur
l’estrade par un présentateur (Armand Okol) distributeur des lauriers, aux
propos déplacés et discourtois surtout à l’égard des dames invitées au podium,
jetant un malaise et un climat de gêne dans l’assistance ; pas de mot de
bienvenue ou sur la portée de l’événement par l’organisateur !
Pourquoi ? Parce que trop flagrant ! Comment peut-il se présenter
comme organisateur et s’adresser à l’assistance alors qu’il s’est attribué le
titre de lauréat ?
Eric Mendi
s’est contenté de se faire tout petit dans la foule, attendant avidement
récupérer son prix et disparaître ! Dans une cérémonie dédiée aux livres,
les éditeurs furent royalement oubliés ! bien-sûr, car l’éditeur du
lauréat-organisateur est aussi son association, qui l’a présenté à son propre
concours ! Bien plus curieux, pas de représentant du principal sponsor de
l’événement, Castel Beer, qui aurait pu expliquer cette association entre une
marque brassicole et la littérature !
Les
questions que je me pose c’est comment les membres du jury ont travaillé et
procédé à leurs délibérations ; quels sont les choix qu’ils ont porté et
comment entendaient-ils sécuriser les secrets de leurs délibérations ; par
quelle alchimie ont-ils été convaincus de cautionner pareille imposture et
laissé faire en y associant leur nom à cette arnaque ? Qui
étaient-ils ? Des personnalités toutes respectables : Président du
Jury, Guillaume Oyono Mbia ; membres : le sénateur Pierre Flambeau
Ngayap, le conseiller municipal Célestin Djamen, les journalistes Alain Belibi,
Sarah Sakho, Suzanne Kala Lobe…
En fait de
secret, il n’y en avait pas du tout : dans les six valises publicitaires
faisant office de lots destinés aux nominés, les livres étaient déjà
estampillés du sceau de « Lauréat » ou de celui de
« nominé » ! Tout laisse montrer qu’il n’y a jamais eu de
secret, les prix furent attribués d’office par l’organisateur sans même la
pudeur d’un simulacre de proclamation par le jury ! Dans les valises
remises aux nominés, qui ne furent ouvertes qu’après la cérémonie, rien de la
valeur de ce qui avait été annoncé à l’assistance : deux pagnes
publicitaires Castel beer, deux tee-shirts noirs Castel beer, une enveloppe
contenant le règlement du concours, une plus petite contenant une sorte de
diplôme plastifié remerciant le nominé pour sa participation aux GPAL 2013 et
enfin cinq livres présentés par les auteurs en compétition dans les deux
catégories Recherche et Belles-lettres.
Comme le
présentent les billets d’invitation à la cérémonie les nominés furent :
-
Dans la catégorie « Grand Prix de la Recherche » : « L’idée
de progrès dans la diversité des cultures » d’Ebenezer Njoh Mouellé et
Thierry Michalon ; « Textes et Documents du Cameroun
(1815-2012) », de Magloire Ondoa ; « Cameroun, l’opposition en
panne », d’Ahmadou Séhou.
-
Dans la catégorie « Belles-Lettres » : « Un tilleul au
Cameroun », de Marie Hurtel ; « Sur les traces d’une vie en
demi-teinte » de Hilaire Sikoumo ; « Opération Obama »,
d’Eric Mendi.
Les
vainqueurs furent Magloire Ondoa avec « Introduction historique au droit
camerounais : la formation initiale, éléments pour une théorie de
l’autonomie des droits africains », remis au jury sans être officiellement
en compétition et Eric Mendi avec « Opération Obama », puisqu’il est
l’organisateur de l’événement et son propre éditeur.
Floué par
tant de prestidigitation, j’ai appelé Eric Mendi, le président du Club des
Muses, association organisatrice de l’événement pour obtenir des
clarifications ; par exemple comment un titre hors compétition peut-il se
retrouver entre les mains du jury ou comment on peut être à la fois écrivain,
éditeur, organisateur et lauréat de sa propre compétition. Il m’a raccroché au
nez, me demandant de le saisir par mail si j’avais des questions à lui poser.
J’ai récidivé en lui envoyant un texto lui disant que « Je ne peux en aucun cas cautionner une imposture. Je vais saisir
la presse et toutes les personnes concernées ou impliquées dans cette
grossière escroquerie. » Jusqu’ici sans réponse. Je voudrais
simplement lui redire avec force, reprenant la quatrième de couverture de
son « opéra » qu’ : « Eric,
tu mens ! Ton film-là n’est pas vrai. Tu inventes ! ».
Ce qui me
révulse c’est que tant de personnalités respectables soient associées à une
escroquerie de cette nature et que son auteur puisse s’en vanter ou se pavaner
en prétendant se couvrir de gloriole.
Ahmadou
Séhou
Enseignant-Chercheur
Auteur
de : Cameroun, l’opposition en panne : autopsie critique et
propositions de relance, Yaoundé, Editions Lupeppo, 2012, 472 p. (Préface
de Mathias Eric Owona Nguini)
Trente-neuf ouvrages ont été présélectionnés aux GPAL 2013 par vingt-trois associations (dont le Club Kwame Nkrumah et Lire des Merveilles), parmi près de cinq cents livres « présélectionnables » au départ. Une Commission de tri préliminaire s’est ensuite chargée de dégager six livres Nominés. De ces livres Nominés, deux lauréats ont été distingués par les membres du Jury, ainsi identifiés : Guillaume Oyono Mbia (Ecrivain dramaturge) ; Mballa Elanga (CCA / MINAC : Direction Bureau du Livre et de la Lecture) ; Sarah Sakho (Journaliste – RFI) ; Pierre-Flambeau Ngayap (Sénateur / Pharmacien) ; Suzanne Kala Lobè (Journaliste / Membre du conseil National de la Communication) ; Célestin Djamen (Enseignant / Juriste) ; Alain Belibi (Journaliste / Directeur de l’information – Radio Crtv) ; Me Bondje Laurent (Avocat) ; Françoise Ndjako (Responsable Librairie Peuples Noirs) ; Stéphane Akoa (Chercheur – Fondation Paul Ango Ela).
RépondreSupprimerPour plus d'infos: gpalprix@gmail.com
Merci pour ce commentaire qui apporte des précisions sur ce concours littéraire
Supprimer