vendredi 9 août 2019

Kamerun, passé, présent, futur


#Quoi
Projet théatral germano-camerounais porté par Paradise garden productions. Texte de Juvénil Assomo qui fait deux incursions en audio et en vidéo dans la pièce et en devient un personnage. Mise en scène de l’Allemand Jens Vilela Neumann. Avec les comédiens Doris Meli, Jacobin Yarro, Landry Nguetsa, Massan à Biroko, Lyonga Evans Boris, Fondja Mekano Chia.
#La_pièce :
Fille d’immigrés camerounais en Allemagne, Betty Tchako vient au Cameroun pour monter une pièce portant sur les défis actuels du pays : la crise anglophone, le repli identitaire, la corruption, l’alternance au pouvoir, l’émancipation de la femme... Alors qu’elle essaie de faire tant bien que mal son travail, sa scène est envahie par cinq revenants qui veulent narrer une autre histoire : celle de la colonisation allemande, avec des acteurs clés : Jesco Von Puttkamer, Maria Mandessi Bell, Douala Manga Bell, Martin Paul Samba, le sultan Ibrahim Njoya...
Betty a beau lutter, le passé se mêle au présent et refuse de lâcher prise. Avec le futur, ils finissent par former un mélange homogène. Comment résoudre les problèmes du présent et envisager sereinement l’avenir si on ne regarde pas vers le passé ? Comment comprendre la crise anglophone actuelle si on ne remonte pas vers la colonisation ? Comment comprendre la parodie de démocratie si on ne se souvient pas de notre indépendance manquée ?
L’écrivain burkinabé Jacques Guegane disait sur le repli identitaire : «Quand la France a conquis nos territoires, c’étaient des royaumes ethniques. Ils ont réuni tout le monde et ils ont dit qu’ils ont créé un Etat. Pour le moment, nous ne sommes pas encore une Nation mais une compétition des ethnies pour prendre la tête de l’Etat. Il nous appartient de créer une Nation ».
La pièce, théâtre dans le théâtre, finit par prôner le dialogue plutôt que la lutte armée, et la diplomatie plutôt que la guerre pour sortir des crises qui paralysent le pays. Pour cela, il faut soigner les blessures du passé. Mais la réconciliation passe par la vérité et la justice. Von Put Kamer, représentant du colon dans sa globalité, demande solennellement pardon. S’ensuit une séance d’exorcisme pour purifier le présent.
#Ce_que_jai_aimé :
- L’habilité du dramaturge Juvenil Assomo à raconter une histoire coloniale imbriquée dans les défis du présent dans un texte puissant, et pourtant léger.
- La finesse de la mise en scène qui fait passer du passé au présent et vice-versa avec fluidité ; les variations savamment dosés du drame et de l’humour, de la gravité et de la légèreté.
- La performance du comédien Landry Nguetsa dans le rôle de Jesco Von Puttkamer. Avec charisme et justesse, il réussit à rendre ce personnage fort sympathique. Avec Doris Meli dans le rôle de Betty Tchako, il porte la pièce. Mais son costume rose bonbon n’était pas pour me plaire.
- Les comédiens soient issus de générations différentes ; la façon dont ils ont occupé l’espace jouant tantôt sur la scène, tantôt dans la salle avec aisance.
- Le suspens: par deux fois, j’ai cru qu’on arrivait au clap de fin et un instant après, la pièce repartait de plus belle.
- La séance de sport : quand Betty décide d’employer ces personnages du passé qui veulent à tout prix faire du théâtre et les mets au sport, fou rire assuré.
- La scénographie : dépouillée, avec juste deux grands panneaux de direction que les comédiens déplaçaient par moment, ce qui annonçait nouvelle orientation de la pièce. Elle se termine avec les deux panneaux regardant dans la même direction, le passé et le présent réconciliés et tournés vers le futur.
- L’intrusion du téléphone portable dans la pièce, autre personnage, comme outil de communication et comme lampe pour éclairer les comédiens dans la salle.
- La lumière : je ne sais pas trop quoi en dire mais elle a donné souvent de la chaleur à la scène. Elle changeait selon l’humeur de la séquence, pouvait se faire sang un instant et or l’instant d’après.
- La façon subtile d’impliquer le spectateur, de le prendre à témoin, d’en faire un personnage plus que consentant.

#Ce_que_je_nai_pas_aimé :
- Le lent démarrage de la pièce, qui m’a rappelé le véhicule à moteur Diesel de mon père qu’il fallait chauffer près de 30mn avant de pouvoir rouler avec. A l’entame, la scène était froide malgré les notes de saxo, les comédiens manquaient d’assurance et jouaient à différents niveaux sur des rythmes pas harmonisés. Heureusement, au fur et à mesure, ils ont gagné en confiance et se sont accordés, pour livrer une œuvre digne d’intérêt. Cependant, leur maîtrise du texte reste à parfaire.
- La scène où Von Puttkamer demande pardon pour les crimes commis par la colonisation. Malgré les larmes du comédien Landry Nguetsa, elle a sonné creux et vide, tellement pas crédible, presque indécent pour l’Histoire.
- La longueur de la pièce (2h). Même si on ne voit pas le temps passer tellement on est happé par l’histoire, il y a des redites inutiles, des longueurs qui cassent par moment le dynamisme de l’ensemble.
- La vidéo au théâtre : personnellement et de façon générale, j’ai du mal à intégrer cela. Le multimédia là est vraiment obligé dans le théâtre ? On ne s’en passe plus ! Je vais au théâtre pour voir des comédiens jouer en live. Si je veux regarder des vidéos, j’irai ailleurs.
#Représentations :  
Le 25 juin 2019 au Centre culturel camerounais, le 28 juin à 19h au Goethe Institut Kamerun et le 29 juin à 19h à l’espace OTHNI à Titi Garage. Entrées gratuites. Une tournée est prévue en 2020 en Allemagne et en France.

2 commentaires:

  1. obligé dans le théâtre

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  2. Les gens forts n'aiment pas les témoins de leur faiblesse. Et vous pouvez l'apprendre des https://voirfilmvf.tube films...

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