Chercheur
au Centre d'histoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC) de
l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines en France, elle a organisé
un colloque international sur les « 40 ans de cinéma » de
réalisatrices d’Afrique francophone, les 23 et le 24 novembre à Paris au Musée
du Quai Branly et à la Bibliothèque nationale de France (BnF). Elle parle de l’enjeu
de cette rencontre et des difficultés que rencontrent les femmes réalisatrices
en Afrique.
Brigitte Rollet |
Qu’est-ce
qui vous a motivé à organiser ce colloque sur les 40 ans de cinéma des
réalisatrices d’Afrique francophone?
En étudiant l’histoire des
réalisatrices françaises, je me suis rendu compte qu’il y avait les mêmes
problèmes de financement et les mêmes problèmes d’image. Ces réalisatrices ont
toujours été un petit peu marginalisé dans les ouvrages d’histoire du cinéma.
Il y a le fait de ne pas intégrer que le cinéma africain est aussi fait par les
femmes. Je me suis dit qu’il fallait célébrer ces femmes qu’on ne célèbrera sans
doute jamais et marquer l’émergence d’un cinéma fait par les femmes en Afrique.
Historiquement,
la première réalisatrice africaine est la Camerounaise Thérèse Sita Bella avec
son film Tam-tam à Paris en 1963,
mais vous avez plutôt choisi la Guadeloupéenne Sarah Maldoror comme pionnière.
Pourquoi ?
C’est vrai qu’il y a eu Sita Bella
mais les films de Sarah Maldoror et de Safi Faye ont marqué. Je ne pense pas
qu’on pourrait dire la même chose du film de Sita Bella parce qu’il est moins
connu, il y a beaucoup de gens qui ignorent son existence, je ne sais pas où on
peut le voir. C’est aussi le cas pour La
passante de Safi Faye. En organisant ce colloque dans un lieu comme la BnF,
je voulais aussi montrer la difficulté de garder un patrimoine de ces films, rappeler qu’il y a des films qui disparaissent.
Quel
est l’histoire des réalisatrices d’Afrique francophone ?
Elle varie selon les pays, selon
qu’il y a une volonté politique de promouvoir le cinéma. Mais les femmes sont
toujours un peu le parent pauvre du développement de la cinématographie,
surtout dans les sociétés où les différences de sexe font que la place d’une
femme n’est pas derrière la caméra. Quand on cherche des femmes, on les trouve.
Mon souhait c’était de rendre visible cette histoire.
Quels
sont les problèmes spécifiques que rencontrent les réalisatrices d’Afrique
francophone ?
Le cinéma reste une activité
pensée comme masculine. Le fait qu’il y a beaucoup de femmes réalisatrices
n’empêche pas cette perception, et les réalisatrices africaines ne sont pas
vues. Il y a des trajectoires individuelles, mais il y a les développements ou
non des politiques cinématographiques dans les pays. Dans les pays où il y a eu
véritablement une volonté politique de développer le cinéma, il y a eu plus de
femmes réalisatrices que dans les pays ou, au contraire, cette préoccupation
n’existe pas. C’est une question de financement. Le cinéma est un art coûteux,
il y a quand même, malgré tout, des hésitations des producteurs à confier des
budgets élevés à une femme. Et on ne prête qu’aux riches. Si on ne peut pas
faire ses preuves, on ne peut pas justifier de recevoir un budget important, c’est
une situation que les réalisatrices africaines partagent avec de nombreuses
réalisatrices occidentales.
De
plus en plus de festivals de films de femmes se créent dans le monde. Est-ce
que ces festivals spécialisés sont la solution ?
Les festivals de films de femmes,
c’est une solution pour que ces films soient vus. Après, la question est de
savoir si on donne ou non la possibilité à ces films d’exister en dehors des
festivals, et ça c’est le problème du cinéma africain en général. C’est un
cinéma qui est beaucoup financé mais qui a du mal à trouver de la place dans
les salles en sorties normales. C’est un phénomène global. Si les festivals de
films de femmes permettent aux films d’être vus, ça ne peut avoir qu’un effet
positif pour les femmes qui font du cinéma en Afrique.
Propos
recueillis par Stéphanie Dongmo
On doit penser à une industrie cinématographique en Afrique, soutenu par les Etats.
RépondreSupprimerVous avez bien raison Noel. Et penser aussi nous à organiser ce genre de manifestations pour célébrer nos professionnels, et non plus laisser les autres le faire à notre place.
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