A
travers le langage des adolescentes des banlieues, Les roses noires, le documentaire de Hélène Milano, interroge leur
rapport au monde et à la France, aux garçons et à la féminité. Un sujet intéressant
desservi par une forme sans grand intérêt.
Elles ont entre 13 et 18 ans.
Elles ne sont plus des enfants, mais pas encore des femmes. Elles sont d’ici
par leur naissance et d’ailleurs par leur ascendance. Dans cet entre-deux, elles
sont prises en étau entre la langue de leurs parents et le français enseigné à
l’école. Le « langage des banlieues », qu’elles appellent « wesh »,
semble alors une juste compromission. C’est un mélange du français et de toutes
les langues que l’on retrouve dans les cités qu’elles habitent, de l’arabe au
ouolof, en passant par le comorien et le portugais. Une langue créole qui
ressemble à la France d’aujourd’hui, profondément hybride.
Une scène du film |
Hélène Milano donne la parole à
14 filles de banlieue pour que, à travers le fil conducteur de la langue, elles
s’interrogent sur leur rapport aux garçons et à la féminité, au monde et à la
France. « On est rejeté par la France
», dit Hanane ; « ils ne veulent pas
de nous », renchérit Moufida. Le sentiment d’exclusion est très fort.
Dans ce pays assimilationniste, « le
langage des banlieues » apparaît comme une résistance, une fracture
linguistique qui vient en renfort à la fracture sociale. Mais en ces temps où
le chômage campe devant les portes, parler correctement le français est un
atout et elles le savent. Placées en situation officielle d’entretien, les
adolescentes essaient tant bien que mal de rentrer dans la norme langagière.
La
féminité en question
Qu’elles soient du 13 (Marseille)
ou du 93 (Le Blanc-Mesnil, Stains, Saint-Denis, Montfermeil, Clichy-sous-bois),
les adolescentes filmées rencontrent les mêmes problèmes et en parlent sans
tristesse. Garçons manqués, elles doivent assumer leur féminité et doutent de
l’avenir. Mais leur plus grande peur ? Les garçons. Qu’ils leur prennent
leur virginité ou leur bâtissent une réputation de fille légère. Pour évoluer
dans ce monde incertain, elles se sont fabriqué une carapace d’insolence et
d’agressivité. Qui peut être mis sur le compte de la vie en banlieue ou de l’adolescence.
Hélène Milano. |
Construit en plusieurs parties sur une narration sans intérêt qui
va du langage aux garçons, en passant par la féminité, le documentaire raconte,
au final, une histoire lisse qui sélectionne ce que les filles ont en partage
et gomme ce qui fait la particularité de chacune d’elle. Le résultat est le
regard que la réalisatrice pose sur la réalité, corroboré par des morceaux choisis
d’interviews face caméra.
N’empêche, le film choral de Hélène Milano est révélateur et
attendrissant. Ce documentaire social répercute les bruits et les rires, les peines
et les peurs des filles qui racontent la banlieue de l’intérieur. Pour
approfondir ce propos, il leur donne exclusivement la parole. La réalisatrice française, par
ailleurs actrice et metteuse en scène, montre ces jeunes filles sans fard, avec
la même délicatesse qu’elle a mis dans Nos
amours de vieillesse (2005), son premier film documentaire. Les roses noires rend hommage, selon la
définition de Hanane, 14 ans, à ces « femmes à la féminité cachée ».
Hélène Milano ne compte pas
s’arrêter en si bon chemin. La seconde partie de ce projet donnera la parole
aux garçons des banlieues, pris en otage entre la représentation de virilité et
le sentiment de danger qu’ils symbolisent pour les filles.
Stéphanie
Dongmo
Fiche
technique
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Date de
sortie : 28 novembre 2012
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Durée : 74min
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Réalisatrice: Hélène Milano
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Producteur : Comics strip
production
-
Distributeur : Art
Cinefeel
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