mardi 4 mars 2014

Cinéma : Des films contre les violences faites aux femmes

Le Cinéma Numérique Ambulant a organisé, du 14 au 28 janvier, une tournée de projections-débat en plein air dans des villages de l’Extrême-Nord.

Près de 400 personnes attendent impatiemment le début de la projection. 
 Mardi, 21 janvier 2014 à Bogo. Il est 17h30 sur la place du village, devant le lamidat. L’équipe du CNA Cameroun monte l’écran et le matériel pour la projection. Tout autour, près de 300 personnes attendent déjà impatiemment le début de la soirée. Ils seront 800 à la fin de la soirée. Certains, surpris, regardent de tous leurs yeux le grand écran qu’ils découvrent.

18h30. La nuit est tombée, la prière du soir vient de s’achever, la projection peut commencer. Au micro, Valérie Tchuente, l’animatrice, présente le projet de ciné-débat éducatif contre les violences faites aux femmes que le Cinéma Numérique Ambulant (CNA) du Cameroun mène dans les départements du Diamaré et du Mayo-Tsanaga, région de l’Extrême-Nord, en partenariat avec le Fond canadien d’initiative locales.

Assis devant sa cour, le lamido assiste de loin à la projection. Le sous-préfet de Bogo, Fouapon Alassa, est présent. De même que la déléguée d’arrondissement de la Promotion de la femme et de la famille, Pauline Monembou, qui, durant le débat, répond aux questions du public en sa qualité de personne-ressource. Deux films sont diffusés : « Lani » du Béninois Claude Balogoun qui porte sur la répartition inégale des travaux domestique entre fille et garçon dans une famille et « Moolaadé » du Sénégalais Sèmbène Ousmane, sur l’excision et le courage d’une femme.

Un programme qui plait particulièrement au public. Le long métrage de fiction constitue le clou de la soirée. Les cris d’horreur fusent quand Collé Ardo, le personnage principal du film, se fait fouetter sur la place du village par son mari. Les commentaires vont bon train dans l’assistance, toute la soirée. Les populations saluent le courage de cette femme qui a su défendre les droits de sa fille. D’autant plus que le film est traduit en fulfulde, la langue locale, en simultanée à la diffusion.

Puis vient le débat. Les gens se bousculent pour prendre la parole et parler des violences et discriminations dont les femmes sont victimes : poser des questions, témoigner de leur expérience ou dire simplement leur réticence. Les femmes restent en retrait et se taisent. Mais les jeunes filles brisent le silence et disent leur détermination à s’autodéterminer, face aux hommes qui essaient d’expliquer, de justifier. Le débat est lancé, les discussions au sein de cette communauté se poursuivront bien après le passage du CNA.

Cinéma social 

Le cinéma pour promouvoir l’équité homme-femme, à quelques semaines de la Journée internationale de la femme. Violences physiques et psychologiques, viol, excision, mariage forcé et précoce, scolarisation de la fille, tout y passe. Pour présenter ce projet, la présidente du CNA Cameroun, Stéphanie Dongmo, a donné une conférence de presse le 14 janvier à Maroua. Elle explique que les problèmes cités plus haut limitent les capacités des femmes, les exposent à la dépendance et réduisent leur contribution dans la lutte contre la pauvreté. Aussi, « le but de ce projet est d’amener les femmes, mais aussi les hommes et les jeunes, à prendre conscience des discriminations et des violences dont les femmes sont victimes. Cette prise de conscience va entraîner un changement favorable de comportements, propice à l’autonomisation des femmes ».

Mais pourquoi utiliser le cinéma pour faire passer des messages sociaux ? Stéphanie Dongmo répond : « Il existe une véritable synergie entre cinéma et sensibilisation. Le cinéma est un canal approprié pour la diffusion des messages vecteurs de  développement humain durable. Par le billet de l’imaginaire et de la symbolique, les films que nous projetons permettent à des gens peu informés de percevoir que d’autres choix sont possibles pour leur vie ». Joseph Peyo, le chargé de programme politiques et affaires publiques au Haut-Commissariat du Canada au Cameroun, ajoute: « nous pensons que le CNA est un moyen puissant pour faire passer des messages concernant la promotion des droits de la personne ».

Par cette opération, le CNA Cameroun espère toucher 10 000 personnes. Un public conquis, qu’il reste à fidéliser pour le cinéma africain.

Ashley Tchameni 

Article paru dans la mensuel Mosaiques de Février 2014 

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