lundi 25 avril 2011

Roman : Parents généreux, enfants ingrats


Dans « Chagrins de parents », Jean Aimé Ribal décrie la misère d'une femme vieille, pauvre et malade, abandonnée par ses trois enfants.


Dans les sociétés africaines, il est généralement admis que faire des enfants est une assurance pour ses vieux jours. Flore Maguip à Nkonen, l'héroïne du roman « Chagrins de parents » de Jean Aimé Ribal, publié en 2010 chez L'Harmattan, le croyait aussi. Jusqu'au moment où, vieille, pauvre et malade, elle est complètement délaissée par ses enfants auxquels elle a pourtant donné tout son amour et toute sa fortune.

Veuve à seulement 26 ans, Flore Maguip à Nkonen décide de ne pas se remarier pour se consacrer entièrement à ses enfants, qu'elle élève seule, grâce au commerce de vivres. Elle leur donne énormément d'amour, beaucoup d'argent et peu de gifles. Au prix d'énormes sacrifices, elle envoie ses deux fils étudier en France. A sa fille, elle offre un mariage princier. Elle est encore là pour les relever chaque fois qu'ils tombent. Elle finit par leur céder toute sa fortune. Démunie et affaiblie par le temps, Flore Maguip à Nkonen est détestée par ses beaux-enfants. Ses enfants ne la mettent pas en maison de retraite, mais l'écartent de leur vie et se désintéressent de son sort. L'infortunée mère se réfugie dans son village, où elle vit misérablement. Lorsqu'elle tombe malade, aucun de ses enfants ne lui tend une main secourable. Maguip à Nkonen décède finalement, seule, sans soins.

Aussitôt informés de son décès, ses enfants se précipitent au chevet de la morte. Eux qui se sont le moins souciés d'elle pendant sa maladie, sont ceux qui la pleurent le plus. Ils ne lésinent sur aucun moyen pour lui organiser un enterrement grandiose. Morte dans le dénuement, Maguip à Nkonen est enterrée dans l'abondance.

« Parricide silencieux »

L'informaticien Jean Aimé Ribal, dans ce premier ouvrage émouvant financé par la Caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps), met le doigt sur un phénomène social dont on parle peu. Son roman est inspiré d'une historie vraie, dans laquelle les parents sont pourvoyeurs, jamais receveurs. Ce qu'il qualifie de « parricide silencieux ». Dépité, il s'interroge : « L'amour serait-il un ruisseau qui coule généreusement d'amont en aval, des parents vers les fils, sans jamais se soucier de remonter son cours? » Aux enfants, « Chagrins de parents » fait cette recommandation que l'on trouve dans toutes les religions du monde : « Tu honoreras ton père et ta mère ». Mais conscient que « l'ingratitude est le premier défaut naturel de l'homme », Jean Aimé Ribal donne, en filigrane, ces conseils aux parents : dépensez pour vos enfants le strict nécessaire, en faisant des économies pour vos vieux jours ; ne léguez votre fortune qu'après votre mort, pour être sûrs que vos enfants, cupides qu'ils sont, ne s'éloigneront pas de vous.

Mais comment se méfier de nos enfants qui sont la prunelle de nos yeux ? Comment refuser nos richesses matérielles aux personnes qui sont notre richesse la plus chère ? L'adoption d'un code de la famille et des personnes, annoncé au Cameroun depuis 1997, permettra peut-être de résorber ce problème en consacrant la protection des ascendants par les descendants.

Stéphanie Dongmo


Jean Aimé Ribal

Chagrins de parents (roman)

L'Harmattan Cameroun

2010, 225 pages


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire