« Dankumba » a été présenté en ouverture du
Festival du film de Masuku le 13 août 2014 au Gabon, et un hommage rendu à son
réalisateur. Le Malien Bakary Diallo est décédé dans le crash du vol d’Air
Algérie le 24 juillet à l’âge de 31 ans, en compagnie de son confrère
camerounais Lorenzo Mbiahou.
Production : Le Fresnoy
Pays : Mali
Année : 2011
Un arbre centenaire. Un
village traversé par une route poussiéreuse. Des pieds d’homme. L’eau qui
crépite sur le sol. Le sable qui vole dans le vent. Le bruit du rasoir qui tond
une tête. Les incantations d’une mère... Le tout est un savant agencement de
scénettes, de gestes, de lieux et d’images. Des cartes postales empreintes de
beaucoup de poésie. Mais aussi de mysticisme.
Le court-métrage
retrace, en quelque sorte, la journée presque ordinaire d’un homme, un traditionnaliste,
dans un village ordinaire d’Afrique. Ainsi que les infinis croisements de
destins qui forment une vie. Ses gestes sont méthodiques, son pas cadencé. Dankumba
désigne un rituel accompli dans la région de Kayes, au Mali. Bakary Diallo en a
fait le titre de son avant-dernier film. Il pose la question du sacré et des
superstitions, à la limite des mondes visible et invisible.
Une scène du film |
Car ici, tout est signe
et symbole. Des sacrifices posés au milieu de la route et qui effraient les petits
mendiants aux cheveux enterrés dans le sol, en passant par le traditionnaliste qui,
à son réveil, prend le soin de poser sur le sol d’abord le pied droit, et
seulement ensuite le gauche. Ces gestes partent des croyances répandues dans
toute l’Afrique subsaharienne selon lesquels se lever du pied gauche gâche la
journée, et que les sorciers peuvent atteindre une personne à partir de ses
cheveux.
Même les bruits
familiers comme le chant de petits mendiants ou le caquètement d’une poule
semblent prendre, ici, une signification particulière. D’autant plus que le
montage lent, réalisé par Bakary Diallo lui-même, assisté de Fréderic Dupont,
finit de jeter le spectateur dans une ambiance initiatique. Pour un peu, on
croirait replonger dans le poème « Souffle » de Birago
Diop : « Ecoute plus souvent /
Les choses que les êtres / La voix du feu s’entend / Entend la voix de l’eau /
Ecoute dans le vent / Le buisson en sanglot… »
Bakary Diallo |
En 12mn, le film parle
peu mais dit beaucoup. Dans la dernière scène, le traditionnaliste remet à
l’endroit un pied de sandale retourné avant de continuer sa route. Comme pour
remettre une Afrique tourmentée sur le droit chemin. Un chemin qui serait l’animisme ?
« Dankumba » est sorti à la vielle de
la crise au Mali, menacé par l’intégrisme religieux. Qui est encore le sort de
bon nombre de pays africains.
Prix « Les amis du
Fresnoy », Studio national des arts contemporains de Tourcoing en France en
2011, « Dankumba » prédisait
à Bakary Diallo un brillant avenir cinématographique. Le destin en a décidé
autrement.
Stéphanie
Dongmo
Fiche
technique
Scénario-Réalisation :
Bakary
DialloProduction : Le Fresnoy
Pays : Mali
Année : 2011
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