Le dernier épisode du feuilleton à
l’eau de rose à l’Elysée s’intitule « Merci
pour ce moment ». Le brûlot de l’ex-première dame de France, écrit
dans la douleur et la colère, est la vengeance d’une femme qui refuse de souffrir en silence. Au banc des accusés, un François Hollande au
plus bas des sondages, présenté comme un homme politique peu fiable.
En
janvier 2014, le Président français, pris la main dans le sac de l’infidélité, avait
mis fin à sa vie commune avec Valérie Trierweiler en 18 mots glacés saisis dans
un communiqué à la presse. Obligeant ainsi celle qui était première dame de
France à sortir de l’Elysée par la petite porte. Pour panser ses plaies, Valérie
Trierweiler a eu besoin de 130 pages de texte. L’humiliation ayant été
publique, la réparation se devait de l’être aussi. Son ouvrage intitulé « Merci pour ce moment » est
sorti le 4 septembre dernier aux éditions Les Arènes.
En
fait d’ouvrage, c’est une longue lettre ouverte adressée à François Hollande.
Elle lui dit « merci pour ce moment,
merci pour cet amour fou, merci pour ce voyage à l’Elysée ». Mais surtout « merci pour ce gouffre dans lequel tu m’as
jeté » après une rupture brutale et injuste. Nul doute en lisant ce livre écrit avec des larmes que la
blessure est encore saignante, la colère vivace, la rancune tenace. Valérie
Trierweiler est à terre. Comment pouvait-il en être autrement ? «J’ai été jetée à la face du monde comme un
mouchoir usagé (…) En quelques heures, ma vie a été dévastée (…) Je me suis
retrouvée seule, étourdie, secouée de chagrin. Il m’est apparu comme une
évidence que la seule manière de reprendre le contrôle de ma vie était de
raconter», écrit-elle.
Mégère,
briseuse de ménage, Première pute de France, First girlfriend, cocue de la
République… Depuis l’accession de François Hollande à la magistrature suprême,
les qualificatifs pour désigner son ex-compagne sont nombreux. Nés du sentiment
d’illégitimité qu’elle renvoyait dans son rôle de Première dame. Illégitime
parce qu’elle a été à l’origine de la séparation entre Hollande et la mère de
ses quatre enfants, Ségolène Royal. Illégitime parce qu’elle n’était que la
petite amie et pas l’épouse. Illégitime enfin parce qu’elle entre à l’Elysée en
portant le nom d’un autre homme, son ex-mari.
Valérie
Trierweiler n’avait certainement pas les épaules assez larges pour le rôle de
première dame. Sa jalousie maladive, sa manière de se couper du monde à chaque
tempête, de ramener tout à elle alors que c’est du destin d’un pays qu’il
s’agit, l’ont desservi. Pour autant, elle reconnaît sans peine ses défauts et
ses erreurs. Pour autant, elle ne méritait pas de payer pour un crime dont elle
était pourtant la principale victime, l’infidélité d’un président de la
République devenu banal, à force de vouloir être normal.
« Le silence de l’être aimé
est un crime tranquille ».
Cette citation de l’écrivain marocain Tahar Ben Jelloun ouvre les
confessions de Trierweiler. Née d’une famille modeste, journaliste politique, mariée
deux fois, divorcée deux fois, mère de trois garçons, devenue première dame sans
y être préparée. Un rôle indéfini et sans statut officiel dans lequel elle a eu
du mal à trouver sa place. Ses faits d’armes, en 20 mois à l’Elysée, sont
quelques actions humanitaires qu’elle continue à mener malgré sa répudiation. Une
bien maigre contribution qu’elle a besoin de souligner, tant ses actions sont
passées inaperçues.
Sur
le plan sentimental, ce livre est un mélange d’amour et de haine d’une
amoureuse en puissance, comme on peut en trouver dans un Guy des Cars. Sur le
plan politique, c’est une attaque frontale contre Hollande, le président le
plus impopulaire de la 5ème République. Celle qui a partagé sa vie
durant presque neuf ans le décrit comme quelqu’un qui n’aime pas les pauvres
qu’il appelle « les sans-dent », et ne supporte pas les handicapés. Un
homme froid, calculateur, « le roi
du double discours, de l’ambiguïté et du mensonge permanent » traitant
ses collaborateurs avec mépris. Un homme politique qui ne sait plus où est sa
gauche.
Le désir de vengeance de Valérie Trierweiler transparaît
dans chacune de ses phrases. Elle y ajoute de la mauvaise foi lorsqu’elle jette
sur la place publique des conversations privées qui mettent en cause la sincérité
politique du président. Le fait de dire « est-ce
moi qui ai commencé ? » ne la dédouane pas de ce déballage public
dont on se serait bien volontiers passé. Car ni elle, ni Hollande n'en sortent grandi. Mais la coupe étant versée, il faut la
boire jusqu’à la lie. Au passage, elle réalise un joli coup commercial et
s’assure un revenu substantiel, elle qui craignait la précarité à son départ de
l’Elysée. Tiré premièrement à 200 000 exemplaires, « Merci pour ce moment »
a été épuisé en quelques jours dans les librairies. Le style est simple et
digeste pour raconter la fin d’une relation qui aurait été banale si les
protagonistes n’étaient des célébrités.
En
commettant ce livre alors que Hollande se fait pressant pour la reconquérir et
lui propose même de l’épouser, Valérie Trierweiler sait que le retour ne sera plus
possible. Sans doute parce qu’elle sait, au fond d’elle-même, que cette
promesse, comme beaucoup d’autres, ne sera pas tenue. Ce livre-évènement nous donne, au final, une belle
leçon de vie: on devrait mettre autant de soin à rompre qu’on a mis d’intensité
à aimer.
Stéphanie Dongmo
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