C’est sous ce slogan que les manifestants de la place Tahrir au Caire impulsent la révolution, dans le film « Après la bataille » de l’Egyptien Yousri Nasrallah, seul film africain en compétition officielle pour la palme d’or à Cannes. Un sujet intéressant desservi par un scénario balbutiant. Descendu par la critique, le film est passé très loin de la Palme d’or, décernée le 17 mai 2012.
Une scène du film avec Mahmoud et Rim. |
Le film d’actualité prend pour prétexte
une histoire d’amour improbable pour traiter d’un sujet politique. Mahmoud
(Bassem Samra) est un cavalier illettré et pauvre. Il fait partie des personnes
qui, le 2 février 2011, ont chargé les manifestants sur la place Tahrir au
Caire. Manipulé par les hommes du régime Moubarak qui sont pour l’immobilisme
qui protègera leurs intérêts, Mahmoud pense que c’est la solution pour ne pas ôter
le pain de la bouche de ses enfants. Il ne peut plus vivre du tourisme car les
étrangers ont déserté l’Egypte. Pire, 22 ans après la chute du mur de Berlin,
un autre mur de la honte a été construit à Nazlat, son quartier, pour barrer
l’accès des pyramides aux populations afin de les contraindre à s’en aller.
La rencontre de Mahmoud avec Rim (Mena
Shalaby), journaliste et militante pour la révolution, et surtout le baiser
qu’elle va lui donner un soir, va changer sa vie et ses perspectives. Mais après
la bataille, les plaies tardent à cicatriser. Ce d’autant plus que grâce à Facebook,
personne n’a oublié « les cavaliers de la place Tahrir » dans un pays
où se prononcer contre la révolution est un crime. L’amour (ou l’amitié ?)
de Rim sera pour lui une commission vérité, justice et réconciliation qui va
lui permettre de se débarrasser de ses démons pour faire face. Pour Yousri
Nasrallah, les victimes ne sont pas toujours du côté qu’on croit :
« j’avais vu 150 fois la charge des chameaux à la télé, et j’étais à 100%
convaincu que ceux qui les montaient étaient armés. Au moment d’utiliser ces
séquences dans mon court métrage (Collectif 18 jours, 2011), je découvre
stupéfait qu’ils n’ont pas d’armes, et que ceux qui se sont le plus fait
rosser, ce sont les cavaliers », raconte le réalisateur sur la plaquette
de présentation de son film.
Pain, liberté, dignité
« Après la bataille » est fort
de signification politique, au moment où le peuple égyptien, qui a perdu ses
illusions, vote pour un avenir incertain. D’après le réalisateur, « la
véritable révolution n'a pas encore commencée, ce qui a commencé c’est le
sentiment révolutionnaire ». Ce film exprime sa peur de constater que la
révolution n’a servi à rien, entre les candidats islamistes et les hommes du
régime Moubarak qui se disputent le pouvoir. « Je percevais ce qui me semblait
un leurre: la croyance en la jonction du peuple et de l’armée. C’est l’armée
qui possède ce pays, c’est elle qui le gère, et qui le gère mal depuis Nasser.
Je voyais aussi se dessiner le piège du projet constitutionnel, tel qu’il s’est
concrétisé avec le référendum du 19 mars, avec un rafistolage qui ne règle rien
et qui fonctionne comme un chantage imposé par les islamistes ». Comme pour conjurer le mauvais sort, le slogan
de la révolution est plusieurs fois répété dans le film : pain, liberté,
dignité. Mais pas seulement en Egypte. Au cours d’une conférence de presse, l’auteur
de « La porte du soleil » (2004), un film qui dénonce le problème
palestinien, a annoncé qu’il ne diffuserait pas ses films en Israël « tant
que ce pays occupera les territoires de la Palestine ».
Le seul film africain en compétition
officielle pour la Palme d’or à Cannes a une dimension documentaire, en restant
cependant une fiction. Mais tourné sans véritable scénario, à la va-vite
pendant que les évènements réels se déroulaient, le film manque d’épaisseur sur
un sujet dont on attendait beaucoup. Mais en Egypte, l’espoir est permis. Sur
un pan du mur de Nazlat sur lequel joue un enfant, l’on voit des pyramides et
des chameliers. Allégorie d’une future Egypte prospère, celle des Pyramides.
Stéphanie
Dongmo à Cannes
Fiche
technique
Titre :
Après la bataille
Réalisateur : Yousry Nasrallah
Scénario et dialogues : Omar Shama, Yousry Nasrallah
Montage : Mona Rabi
Son : Ibrahim dessouky
Durée : 2h05
VO : arabe
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