- Garga Haman Adji dédicace son dernier ouvrage, « Le mal africain. Diagnostic et thérapie », ce mardi à 18h à l'hôtel Hilton de Yaoundé. L'essai de 322 pages a paru en 2009 aux éditions l'Harmattan-Cameroun. L'auteur y propose les Etats-Unis d'Afrique, sa une médication aux maux de l'Afrique qui sont surtout le produit de l'irresponsabilité de certains dirigeants africains et de la léthargie de leurs peuples. Garga Haman Adji est le président de l'Alliance pour la démocratie et le développement (Add).
mardi 29 mars 2011
Livre : Garga Haman Adji veut soigner le mal africain
jeudi 24 mars 2011
Musique : Vibrations dans les bacs
Cette compilation de 10 titres comporte non seulement des indémodables classiques d’ici et d’ailleurs dont "Sophie" de Dyna Bell, "Hôtel California" du groupe des Eagles et "Tago Mago" du groupe Kaoma, mais aussi des inédits que les habitués du cabaret la Réserve auront le plaisir de découvrir en spectacle dédicace ce vendredi, et demain samedi, au cabaret la Réserve. Anne Marie Nzié et Tonton Ebogo interviendront en guets stars.
Cathy Yogo
Agenda du week-end à Yaoundé
Musique. Pour sa 1ère édition de l'année 2011, Mango night présente le groupe de hip hop Floor art crew, 1er prix découverte au festival Massao 2010. Ainsi que Laurenoare, Mystere D et Erta. 19h30 au Ccf de Yaoundé.
Humour. La 2ème édition de Alliance comedy club s'ouvre à 18h30 au Théâtre de Verdure à Ngaoundéré. Artistes invités : Petit Gougou, Gadjama, Noël, Big brother, Jojo, Fita, Kelly et Béatrice.
Théâtre. « Comment faire des espaces privées une alternative aux centres culturels institutionnels pour le développement de la diffusion locale du théâtre au Cameroun? » C'est le thème d'un débat qui se tient à 10h à la Centrale Diras à Yaoundé, dans le cadre des Scènes nationales du théâtre camerounais. Panélistes : Jean-Claude Awono, Soleïma Arabi, Martin Ambara, Ghonda Nounga...
Samedi, 26 mars
Patrimoine. Ouverture d'un atelier sur la publication en ligne des langues camerounaises à l'Institut Goethe de Yaoundé, dans le cadre du projet « Going Kompyuta ».
Musique. « Le passager 00237 », c'est l'intitulé du récital de poésie urbaine qui sera donné au Ccf de Yaoundé à partir de 19h30. Ce récital met en scène les problèmes existentiels au Cameroun, il est mis en scène par Romuald Mbasse, alias Stone.
Nécrologie : Elisabeth Taylor est morte
L'actrice anglo-américaine a succombé à une insuffisance cardiaque mercredi dernier à Los Angeles, à l'âge de 79 ans.
L''actrice Elizabeth Taylor est morte à l'âge de 79 ans. L'actrice anglo-américaine, dont la santé fragile défrayait la chronique depuis plusieurs années, avait été admise en février au Cedars Sinaï de Los Angeles pour insuffisance cardiaque.
Elizabeth Taylor s'est fait connaître des cinéphiles dès l'âge de 12 ans dans «Le Grand National», où elle partage l'affiche avec l'ancien enfant star Mickey Rooney. L'héroïne de «Géant » et de « La chatte sur un toit brûlant » a été nominée cinq fois aux Oscars et a décroché deux statuettes pour « Vénus au vison » en 1960, et six ans plus tard pour « Qui a peur de Virginia Woolf? » L'actrice aux 50 films, dont la carrière a décliné dans les années 70, n'était pas apparue à l'écran depuis 2001 et le téléfilm « Old Broads ». Au cinéma, son ultime rôle a été en 1994 avec les Pierrafeu.
La comédienne était aussi célèbre pour sa vie sentimentale tumultueuse. Mariée huit fois, c'est sa liaison faite de disputes homériques et de réconciliations avec Richard Burton qui a le plus fasciné. Ils se marièrent deux fois en 1964 puis en 1975 avant de se séparer définitivement en juillet 1976. Très affectée par la mort de son ami Rock Hudson en 1985, Elizabeth Taylor s'est beaucoup investie dans la lutte contre le Sida.
Source : lefigaro.fr
Médias : L'actualité sportive en kiosqu
Le premier numéro de L'Actu-Sport, l'hebdomadaire dirigé par Emmanuel Gustave Samnick, a paru mardi dernier.
Un nouvel hebdomadaire sportif vient occuper la place laissée vacante dans la presse camerounaise par la disparition de La gazette olympique et Ndamba. Le premier numéro de L'Actu-Sport est en kiosque depuis hier. Son directeur de la publication, Emmanuel Gustave Samnick, est un ancien du groupe South media corporation, où il dirigeait le magazine Ndamba.
Actualité oblige, à la Une du tabloïd de 16 pages en noir et rouge, le match Cameroun-Sénégal du 26 mars prochain à Dakar. Le journal propose un dossier de quatre pages qu'accompagnent les schémas tactique des deux formations et les hommes clés du match. « Le mag de tous les sports » est un plein d'œuf d'informations footballistiques. Les photos tiennent, ici, une place prépondérante, tout comme le vox pop, où l'opinion de l'homme de la rue est pris en compte. Des sous-rubriques comme « L'homme de la semaine » et « Confidences » rafraîchissent le journal.
Il est toutefois à regretter que ce premier numéro, imprimé à 2000 exemplaires par Sopecam, souffre de problèmes survenus lors du rognage : l'intitulé des rubriques a sauté sur certains exemplaires, de même que les notes de bas de page. Par ailleurs, plusieurs articles ne sont pas signés. Le rédacteur-en chef, Alphonse Sinkam, explique que « l'équipe d'Actu-Sport continue à se former ». Cette équipe est constituée de quatre journalistes permanents, dont Alfred Epacka, ancien stagiaire à Mutations, très ému de faire partie de cette aventure : « J'ai le sentiment d'endosser une grande responsabilité. Je travaille avec des gens qui ont fait leur preuve, c'est un défi personnel », avoue-t-il.
L'Actu-Sport est édité et distribué par New pages group (Npg), dont E.G. Samnick est le promoteur et le gérant. Npg va aussi éditer, dans les prochains jours, un quotidien, « L'actu ». Dans son éditorial, le Dp de L'Actu-Sport explique que ce journal « vise à combler un vide criard au Cameroun », pays de sport qui ne dispose pourtant pas d'une presse sportive. Malgré un environnement difficile, «nous avons choisi de relever la pari de la mise sur pied d'une presse sportive spécialisée de qualité […] Nous n'avons pas l'ambition de réinventer le monde, mais de nous inscrire dans la lignée de ceux qui ont choisi le sacerdoce d'informer leurs semblables », poursuit-il.
Stéphanie Dongmo
Légende photo: 21 mars 2011 au siège de l'Association des journalistes sportifs du Cameroun (Ajsc). L'équipe de L'actu-Sport prépare le 1er numéro du journal sportif. De g. à d. Alfred Epacka, Joachim Eteme, E.G. Samnick et Alphonse Sinkam.
Célébration : La poésie d'invite en prison
La Ronde des poètes a commémoré la 11ème Journée mondiale de la poésie le 21 mars dernier à la prison centrale de Yaoundé.
La prison centrale de Yaoundé à Kondengui a abrité la célébration de la 11ème édition de la Journée mondiale de la poésie, lundi 21 mars. L'association La Ronde des poètes du Cameroun y a organisé plusieurs activités artistiques : chants, danse au son du tam-tam, slam et déclamations de poèmes.
La Ronde des poètes en a profité pour annoncer les lauréats du Prix de la poésie rondine qui, pour sa 4ème édition, s'est ouverte aux détenus, sur le thème « Libre derrière les barreaux ». Ainsi, le 1er Prix René Philombe est allé à René Adolphe Onana pour son poème « Même au creux de la vague ». Le second Prix John Shady Francis Eone est revenu à Jean Messomo, 14 ans en prison, avec « Triste destin ». Le premier lauréat a empoché la somme de 50 000 Fcfa, en plus des livres offerts par les Éditions Clé et Ifrikiya. Le second lauréat a reçu 30 000 Fcfa et des livres. La présidence du jury était assurée par Christiane Okang Dyema, poétesse Guadeloupéenne.
Le choix de la prison de Kondengui pour la célébration de cette journée mondiale de la poésie s'inscrit dans un programme de la Ronde des poètes dénommé « L'homme qui te ressemble », qui consiste à faire de la poésie un instrument de lien social, mais aussi d'assistance. Car, d'après Jean-Claude Awono, « la poésie est un lieu de partage et lpoète travaille pour accroître l'humanité. Or, l'humanité ne peut s'accroître que si on apporte à celui qui est dans la privation le peu qu'on a ».
Stéphanie Dongmo
mardi 22 mars 2011
Littérature : Nathalie Etoke, essayiste
Nathalie Etoke a dédicacé son dernier livre, « Melancholia Africana : l'indispensable dépassement de soi », hier à l'espace Canopy à Paris, au cours d'une rencontre modérée par Léonora Miano. Paru en septembre 2010 aux éditions du Cygne en France, « Melancholia Africana » examine la douleur collective de la traite négrière, de l'esclavage, de la colonisation et de la postcolonisation pour générer des transformations radicales. Extrait : « A l'heure de la globalisation, l'idée de communauté noire est frappée d'obsolescence […] Victime de la couleur qui éradique son hétérogénéité, peut-être faudrait-il l'enterrer sous des airs de jazz funèbre en célébrant tout ce qu'elle nous a donné ».
Née en 1977 à Paris, Nathalie Etoké est Camerounaise. Elle enseigne la littérature et le cinéma francophones, ainsi que les études afro diasporiques à Connecticut college aux Etats-Unis. Elle est l'auteure de plusieurs ouvrages dont les romans « Un amour sans papiers » (1999, Cultures croisés) et « Je vois du soleil dans tes yeux » (2008, Presses de l'Ucac).
Arts plastiques : Expo, photos, homos
Des 26 photographies qui tapissent le hall du Centre culturel français (ccf) de Yaoundé depuis le 08 mars dernier, trois accrochent le regard. Colorés, gais, lumineux et créatifs, ces portraits tranchent avec la sobriété des autres photos en noir et blanc. L'auteur, la Sud-africaine Zanele Muholi, a réussi à créer l'illusion autour des images pourtant réalistes, et ce leurre intrigue. Quel est le sexe de la personne représentée sur les trois tableaux? Homme, femme, le public s'interroge. Car, son modèle, l'artiste l'a volontairement placé à la frontière des sexes, dans une série baptisée « Miss D'Vine », du nom de ce militant sud-africain qui s'est prêté à la photographie.
Le premier portrait de la série représente le modèle assis sur le sol. Il porte de fines boucles d'oreilles, un collier multicolore autour du cou, une petite jupe traditionnelle faite de perles et des chaussures à talons d'un rouge vif. Ses cheveux sont assouplis, son torse est nu et sa poitrine plate. Dans le second portrait, le modèle est accroché à une grille et donne l'impression de fuir quelque chose ; mais son regard, qui semble prendre le monde de haut, laisse perplexe. La troisième photo a le même décor que la première, une savane. Debout, le modèle arbore une courte robe noire dont il tient les volants. C'est cette photographie d'un homme travesti en femme que le Ccf a choisi pour illustrer son programme des mois de mars et avril.
Le texte de Zanele Muholi qui accompagne la série « Miss D'Vine », explique : « En tant qu'homos noirs vivant aussi bien sur le continent que parmi la diaspora, nous sommes devenus des êtres indépendants qui inscrivent leur empreinte dans le monde. Pourtant, en raison […] du système patriarcal hétéro [...] très peu d'entre nous le transformons en livres de leur histoire personnelle, car l'histoire officielle est toujours dominée par des patriarches homophobes... » Militante des droits de la femme et de la santé sexuelle née en 1972 à Durban en Afrique du Sud, Zanele Muholi a choisi d'interroger le corps humain et le sexe. Elle traite des groupes marginalisés et des identités multiples, et propose un discours radical sur l'identité sexuelle.
Ses portraits sont-ils trop osés pour être exposés au Cameroun, un pays où l'homosexualité est interdite par le code pénal ? Non, répond Soleïma Arabi, animatrice culturelle au Ccf de Yaoundé: « Je ne vois pas là une apologie de l'homosexualité mais une interrogation. Ce travail choque tout le monde parce que, contrairement à la plupart des artistes, Zanele Muholi interroge une frontière qui est humaine : la frontière de la sexualité entre l'homme et la femme. Je pense que faire un acte artistique c'est toujours faire un acte libre, qui est la liberté de l'artiste, qui est la liberté du Centre culturel français de Yaoundé».
Stéphanie Dongmo
Frontières
En cours jusqu'au 31 mars 2011, l'exposition « Frontières » est organisée par le Centre culturel français de Yaoundé, en partenariat avec l'Institut français et le groupe Bolloré Africa logistics. C'est un panorama de 40 photographies et 13 vidéos d'artistes africains sélectionnes par le jury des Rencontres photographiques de Bamako en 2009. Après Yaoundé, l'exposition itinérante, présentée depuis le premier semestre 2010 en Afrique, sera à Pointe Noire, Lomé, Cotonou, Lagos, Accra, Dakar... A Yaoundé, elle réunit les travaux de huit plasticiens : le Camerounais Guy Wouete, le Mozambicain Berry Blickle, les Sud-africaines Jodi Bieber et Zanele Muholi, le Congolais Baudouin Mouanda, le Malien Salif Traore, le Tchadien Abdoulaye Bayy et le Nigérian Uche Okpa Iroha.
S.D.
jeudi 17 mars 2011
Cinéma : Incursion au pays des morts
« La saison des funérailles », un documentaire réalisé à l'Ouest-Cameroun par le Canadien Matthew Lancit, a été programmé à la 22ème édition du Fespaco.
Matthew Lancit est un réalisateur canadien qui compte à son actif sept courts-métrages, présentés essentiellement dans des festivals. En 2008, il débarque au Cameroun pour retrouver sa fiancée, Blandine Barlet, venue quelques années plus tôt pour préparer une thèse qui s'éternise. Profitant de son séjour, Matthew visite le pays. Au gré de ses pérégrinations, il arrive à Dschang. Ici, il loge dans une maison qui jouxte la morgue. Toutes les fins de semaine, Matthew voit passer des dizaines de corps. Curieux, il décide de suivre le parcours de ces cercueils qu'emportent des corbillards. C'est ainsi qu'il apprend qu'après l'inhumation, tout n'est pas fini. Car, des funérailles en mémoire du mort seront organisés le lendemain de l'inhumation, et souvent plusieurs années plus tard. Il décide d'en faire le sujet d'un documentaire.
« La saison des funérailles », tourné en anglais et sous-titré en français, promène le spectateur au cœur du pays bamiléké, d'une cérémonie de funérailles à une autre. Bamougoum, Dschang, Bana, Bafang, Bangang, Bamougou, Nwangong sont quelques villages où les guides et les amis de Matthew Lancit l'ont conduit. Ici, une famille peine à organiser les funérailles du père. Pendant des années, elle organise des cotisations, sans jamais réunir la somme nécessaire. Là, des funérailles d'une femme battent leur plein. La fête est belle et populaire. Coups de feu tirés en l'air, fanfare et danseurs traditionnels sont au rendez-vous, des messes d'actions de grâces aussi.
Matthew Lancit réussit à saisir la christianisation de cette cérémonie traditionnelle en filmant des messes d'action de grâces qui se tiennent à côté des danses rituelles. Au passage, il campe le conflit de perception désormais au cœur des funérailles, en interrogeant une mère et son fils. Le fils, en l'occurrence le réalisateur camerounais Gervais Djimeli Lekpa, affirme que dans un contexte de pauvreté et au vu des sommes folles dépensées, les funérailles devraient être bannis. Sa mère, elle, n'a qu'un rêve : qu'après sa mort, ses enfants lui donnent des funérailles « dignes ».
Au fil de ses incursions au cœur du pays où « les morts ne sont pas morts », Matthew Lancit se souvient de ses parents décédés et essaie de faire le parallèle entre ces funérailles et la coutume juive dont il est issu. Sans grand succès cependant. A travers ce documentaire ethnologique, le réalisateur pose un regard, à la fois neuf et étranger sur une coutume qui a déjà fait l'objet d'autres films. Sa caméra est parfois trop indiscrète. Par exemple, lorsqu'il s'attarde à filmer des cercueils qui sortent de la morgue, un corps que l'on met en terre ou le crâne d'un ancêtre conservé dans une maison.
Le film est tourné avec une caméra numérique et sa qualité technique n'a visiblement pas été la préoccupation première de son auteur : le son est approximatif, l'image est souvent chancelante et les plans manquent de justesse. Matthew Lancit est par ailleurs resté superficiel sur une tradition qui touche à l'essence même d'un peuple qui la perpétue de génération en génération. Il se contente ainsi de raconter les dépenses, les extravagances et les agapes, sans creuser la symbolique et l'imaginaire qui sous-tendent les funérailles. Avec beaucoup de légèreté, il a clôturé le film par des photos de son mariage avec Blandine Barlet, en 2009 au Canada.
Après le Festival international du film ethnologique à Belgrade en octobre dernier, « La saison des funérailles », sorti en 2010, a été programmé à la 22ème édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision (Fespaco), du 26 février au 05 mars 2011.
Stéphanie Dongmo à Ouagadougou
Fiche technique
Titre anglais : Funeral Season
Réalisateur : Matthew Lancit
Producteurs : Matthew Lancit, Laura Hudock
Voix : Matthew Lancit
Durée : 86 mn
Genre : société
Type : documentaire
Année de sortie : 2010
mardi 15 mars 2011
Cinéma : Une projection sous les étoiles du Faso
Pitmoaga. Un village pittoresque situé à l’ouest du Burkina Faso, à 45 km de Ouagadougou. Pour la seconde fois, la bourgade d’environ 6000 habitants a accueilli, mercredi 02 mars 2011, une projection gratuite en plein air, organisée en marge du Festival panafricain du cinéma et de la télévision (Fespaco) par l'association belge Africalia, à travers son projet Cinetoile, en partenariat avec le Cinéma numérique ambulant (Cna) du Burkina Faso, sur financement de la Commission européenne.
A l’entrée du village, de grands baobabs dépouillés de feuilles accueillent les visiteurs : les équipes d'Africalia et du Cna, une trentaine de Belges venus assister au Fespaco dans le cadre du programme d’Africalia Yéelba Fespaco, et des journalistes. Il est 16h. Le sol est poussiéreux, l’air sec, le soleil haut dans le ciel. Ici et là, des maisons clairsemés sont vident de leurs habitants. Moutons et porcs se promènent non loin des greniers construits hors des barrières des concessions. Normal, nous sommes au pays des hommes intègres. « Yéelba », lancent en cœur les habitants du village amassés dans la cour de l’école primaire de Pitmoaga. Ils disent « bienvenue » en mooré, la langue des Mossi, l’ethnie majoritaire au Burkina Faso. Le chef du village et le maire de la commune rurale de Kokologho sont là aussi.
Pieds poussiéreux, tignasse mal peignée, vêtements sales et déchirés par endroits, les enfants ont les yeux qui brillent et le sourire large. Assis à même le sol, ils tendent le cou pour voir les nouveaux arrivants. Ceux-ci prennent place sur des chaises installés dans la cour de l’école. Le spectacle peut commencer, par un concours de chant et de danse. Une dizaine d’enfants monte sur le podium pour prester, avec l'ambition de décrocher T-shirts et argent. Floby, artiste montant de la scène burkinabé, donne ensuite un concert d’une heure.
19h. La nuit est tombée, l’air s’est rafraichie, les étoiles brillent dans le ciel. La projection peut commencer. « Buud yam » (1h37, 1997), un film du réalisateur burkinabé Gaston Kabore, Etalon d'or de Yennenga en 1997, est à l’honneur ce soir. Le long métrage a été tourné en mooré pour le plus grand bonheur des villageois, et est sous-titré en français pour celui des étrangers. A la fin de la projection, c’est en masse que les plus de 500 personnes présentes vont se diriger vers le buffet de fortune dressé sur la place du village. Jus de baobab, gigots de mouton grillés et frites de pommes de terre sont dévorés avec grand appétit, dans l’obscurité de Pitmoaga.
Stéphanie Dongmo à Pitmoaga
Hervé Madaya et Georges A. Bertrand:«La photo véhicule une certaine poésie»
Interview croisée des co-auteurs du recueil de textes illustrés « Le bleu de mon regard », paru aux éditions Créations à Paris et dédicacé à Yaoundé.
Georges A. Bertrand, photographe français, et Hervé Madaya, écrivain camerounais, vous vous êtes mis ensemble pour publier un recueil de textes illustrés. Comment est né ce projet?
Hervé Madaya: J'ai rencontré Georges sur facebook et je lui ai proposé de lire mes textes pour avoir un autre regard. Il a eu le coup de foudre pour mes textes. Je lui ai alors demandé s'il était possible que nous travaillions ensemble.
Georges A. Bertrand: Les premiers textes que j'ai lus de Hervé n'étaient pas ceux parus dans ce recueil, mais d'autres textes que j'avais trouvé tellement beaux que je me suis dit qu'il faut imaginer quelque chose avec lui. Cela a pris trois ans pour échanger et voir quelle démarche on allait suivre pour un travail commun.
Concrètement, comment avez-vous travaillé ?
Hervé Madaya : J'ai d'abord écrit les textes, que j'ai envoyés à George par mail. Il y a été sensible et a décidé de venir au Cameroun pour pouvoir faire les photos qui vont les accompagner.
Comment avez-vous choisi les lieux à photographier?
Georges A. Bertrand : J'avais déjà les textes. A partir de là, j'ai passé trois semaines à ne penser qu'aux textes, en essayant de les imaginer, et à me demander quelles images pouvaient leur correspondre. On a discuté longtemps pour savoir quels étaient les endroits au Cameroun où, matériellement, on pouvait prendre des photos pour accompagner les textes. J'ai fait les photos en noir et blanc et en argentique. Le noir et blanc laisse la place à l'imagination, et l'argentique, avec un film de 36 poses, m'oblige à réfléchir avant de prendre une photo. C'était l'année dernière.
Et c'était la première fois que vous veniez au Cameroun et en Afrique. Cette méconnaissance du terrain n'a-t-elle pas été un frein ?
Georges A. Betrand : C'est comme une médaille, avec deux côtés. Dans un sens, oui, ca été un frein, parce que je n'ai peut-être pas vu les choses comme j'aurais dû les voir. Mais en étant vierge de toute image, de tout préjugé, j'ai aussi été le plus simple et le plus à même de faire ces photos.
Après ces deux ouvrages, quelle sera la suite, Hervé Madaya?
J'écris surtout des romans. J'en ai proposé à des éditeurs et j'attends. Par ailleurs, avec Georges, on va voir dans quelle mesure produire un autre livre de ce genre. Car, grâce à lui, j'ai découvert que la photographie peut véhiculer une certaine poésie.
Ce livre a été édité par Georges A. Bertrand. Comment se fera le partage des droits d'auteur ?
Georges A. Betrand : Le livre coûte 12 euros en France et 5000Fcfa au Cameroun. A la fin de l'année, chacun de nous touchera 5% de la vente du livre.
Propos recueillis par Stéphanie Dongmo
mercredi 9 mars 2011
Fespaco 2011 : «Pégase», Etalon d’or de Yennenga
Le film du Marocain Mohamed Mouftakir a décroché le premier prix à ce 22ème rendez-vous du cinéma et de la télévision qui s’est tenu du 26 février au 5 mars derniers.
La 22ème édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision (Fespaco) s’est refermée samedi dernier à Ouagadougou. Elle a consacré « Pégase » (2010, 104 mn), le film du Marocain Mohamed Mouftakir, Etalon d’or de Yennenga, la plus prestigieuse distinction cinématographique africaine. Le réalisateur a reçu son trophée des mains de Blaise Compaoré, le président du Burkina Faso, qui a salué une « victoire pour l’Afrique », et affirmé qu’il faut « encourager les cinéastes, créer des partenariats et diversifier les productions ». C’était au cours d’une cérémonie de clôture au stade du 4 août de Ouagadougou, en présence de près de 20 000 personnes, selon des sources officielles.
Le Gambien Cham M’Baye, président du jury du long métrage, a expliqué que ce film a été choisi parmi 18 autres pour « la dynamique de sa créativité ». « Pégase » est un thriller psychologique qui raconte le drame d’une jeune fille élevée comme un homme par son père, dans le culte du « Seigneur du cheval ». Adulte, elle est confrontée à un terrible dilemme: continuer de vivre dans le mensonge ou assumer sa féminité ?
Couacs
Si les problèmes n’ont pas manqué à ce Fespaco, les cinéastes reconnaissent tout de même que cette édition a été mieux organisée que la précédente. Invité sur le podium pour annoncer les prix de la catégorie Tv/vidéo dont il a présidé le jury, le Camerounais François Woukoache a affirmé que « le jury a décidé de ne pas accorder de prix dans cette catégorie au vu de la faiblesse des films présentés». Il a en profité pour lancer un appel au Fespaco, afin « qu’une plus grande rigueur soit accordée à la sélection des films ». Avant cela, le 4 mars, l’organisation du Fespaco a annoncé la disqualification de huit films pour non réception des copies au format 35mm, dont « Noces de coton », un court métrage de Gérard Désiré Nguelé Amougou.
Pour ce Fespaco 2011 qui s’est déroulé sur le thème « cinéma africain et marchés », 12 salles de cinéma répartis dans différents quartiers ouagalais ont été réquisitionnées pour les projections, et 111 films ont été sélectionnés pour des compétitions officielles. Par ailleurs, un hommage à été rendu aux cinéastes disparus, dont le comédien et dramaturge burkinabé Sotigui Kouyaté, prix d’honneur de cette édition parrainée par l’historien congolais Elikia M’Bokolo.
Participation camerounaise
« La métaphore du manioc » de Lionel Meta est le seul film camerounais à avoir eu une distinction au Fespaco. Le court métrage a reçu deux prix spéciaux : celui de la Francophonie et celui de la Loterie national burkinabé, et aussi deux mentions spéciales du jury du film école et de celui du court métrage.
Présente au Fespaco, la ministre de la Culture, Ama Tutu Muna, a convoqué une réunion le 5 mars avec les Camerounais, avec pour objet de discuter des problèmes du cinéma camerounais et de trouver des solutions pour sa relance. Cette rencontre a accouché d’un groupe de travail pour la réforme du cinéma camerounais, groupe coordonné par le producteur Gérard Désiré Nguelé et constituée de trois cadres du Mincult et de 12 cinéastes résidant au Cameroun et à l’étranger.
Le ministre de la Culture a aussi accordé des primes de 200 000Fcfa chacun aux quatre films camerounais en compétition au Fespaco. Il s’agit de « La métaphore du Manioc » de Lionel Meta, « Noces de coton » de Gérard Désiré Nguelé finalement disqualifié, « Ein lebel mit der dulgung » d’Appolain Siewe et « Un Africain en hiver » de Paulin Tadadjeu et Clément Ndzana.
Rappelons que « Muna moto » de Jean-Pierre Dikongue Pipa reste le seul film camerounais a avoir remporté l’Etalon d’or de Yennenga en 1976.
Stéphanie Dongmo à Ouagadougou Palmarès Fespaco 2011 Catégorie long métrage
Etalon d’or de Yennenga : « Pégase », Mohamed Mouftakir, Maroc
Etalon d’argent de Yennenga : « Un homme qui crie », Mohamat-Saleh Haroun, Tchad
Etalon de bronze de Yennenga : « Le mec idéal », Owell Brown, Côte d’Ivoire
Catégorie court métrage
Poulain d’or : « Garagouz », Abdenour Zahah, Algérie
Poulain d’argent : « Tabou », Meriem Riveill, Tunisie
Poulain de bronze : « Tinye so », Daouda Coulibaly, Mali
Mention spéciale : « La métaphore du manioc », Lionel Meta, Cameroun Autres catégories
Meilleure série Tv : « Ismael le gaffeur », Mamadou N’Diaye, Sénégal
Meilleur film Tv/vidéo : « Hopeville », Trengoue John, Afrique du Sud
Meilleur film documentaire : « State of mind », Djo Tunda Wa Munga, RD Congo
Prix artistiques et techniques
Meilleure interprétation masculine: Sylvestre Amoussou (Bénin), dans “Un pas en avant, les dessous de la corruption”
Meilleure interprétation féminine : Samia Mezane (Algérie) dans « Voyage à Alger »
Meilleur scénario : « Voyage à Alger » de Adelkrim Bahloul, Algérie
Meilleure image : Natalie Perrey pour « La mosquée » de Daoud Aoulad-Syad
Meilleur son : Taoufik Mekraz de « Pégase » de Mohamed Mouftakir
Meilleure musique : Wassis Diop pour son travail dans « Un pas en avant », « Un homme qui crie » et « En attendant le vote »
Meilleur montage : « Le poids du serment », Kollo Daniel Sanou, Burkina Faso
Meilleur décor : « Da monzon », Sidy Diabate, Mali
Meilleur affiche : « Essaha », Dahmane Ouzid, Algérie
Films disqualifiés (pour non réception des copies 35mm)
Courts métrages fiction :
- « Bénéré », Serge Armel Sawadogo, Burkina Faso
- « Blissi N’Diaye », Nicolas Sawalo Cissé, Sénégal
- « Noces de coton », Gérard Désiré Nguelé A., Cameroun
- « Un transport en commun », Dyana Gaye, Sénégal
Longs métrages fiction
- « Foreign demons », Faith Isiakpere, Afrique du Sud
- « Raconte Scheherazade, raconte », Yousry Nasrallah, Egypte
- « Restless city », Dosunmu Andrew Waheed, Nigeria
- “The wedding”, Abdel Aziz Sameh, Egypte
Le palmarès du Cameroun au Fespaco
- Etalon d’or de Yennenga 1976 : Jean-Pierre Dikongue Pipa avec « Muna moto »
- Etalon de Yen-Ngan 1999 : Gérard Essomba Mani, acteur dans « Pièces d’identité »
- Etalon de bronze de Yennenga 2007 : Jean-Pierre Bekolo avec « Les saignantes »
- Prix spécial du jury 2007 : Cyrille Masso avec « Confidences »
- Prix spécial du jury 2009 : Joséphine Ndagnou avec « Paris à tout prix »
- Prix du jury 2009 : Daniel Kamwa avec « Mâ Saah-Sah »
- Prix spécial du jury 2009 : Oswalde Lewat avec « Une affaire de nègres »
- Yennenga de bronze 2009 : Auguste Kouemo avec « Waramutheho » (court métrage)
samedi 5 mars 2011
vendredi 4 mars 2011
Wang Johnson Sone : "12 professionnels du cinéma sont pris en charge par l'Etat"
Cette année, quatre films camerounais sont en compétition au Fespaco. Que peuvent ces productions ?
Avant que ces films soient mis en compétition au Fespaco, ils ont été sélectionnés parmi beaucoup d’autres. Cela veut dire qu’ils peuvent remporter des prix. Je ne suis pas le jury, mais, comme ce sont des films camerounais, je souhaite qu’ils gagnent.
Ces films ont-ils été soutenus par le Mincult ?
Ils n’ont pas été soutenus. Ce sont les producteurs et les réalisateurs eux-mêmes qui ont proposés ces films. Dans d’autres pays, l’Etat prépare les films pour le Fespaco, mais chez nous, pour le moment, ce n’est pas le cas. Néanmoins, à ceux dont les films sont en compétition, le Mincult va donner une prime d’encouragement, dont je ne peux pas révéler le montant.
La ministre de la Culture est à Ouagadougou avec plusieurs de ses collaborateurs. Quel est l’intérêt de la présence du Mincult au Fespaco ?
Au Fespaco, il y a beaucoup de producteurs et de réalisateurs de diverses régions. Et si cette délégation camerounaise est là, c’est pour exploiter l’objectif du Fespaco qui est la promotion du cinéma africain, en tissant des relations avec d’autres pays qui font dans le financement et la promotion du cinéma. Ainsi, la délégation du Mincult comprend douze professionnels de la filière, dont trois promoteurs de festivals, trois producteurs, trois réalisateurs, un promoteur d’école de cinéma et une consultante pris en charge par l’Etat. Ils sont ici pour trouver des partenaires dans la coproduction et l’organisation des festivals. Les résultats de leur présence ici aura un effet multiplicateur dans le développement du cinéma au Cameroun.
Fespaco 2011 : Cameroun, îlot de paix
Dans son film « Un homme qui crie », Mahamat-Saleh Haroun décrie la fuite des refugiés tchadiens vers notre pays.
Ce film qui raconte la tragédie d’un père déchu en quête de rédemption aurait pu s’intituler « Le poids du remord ». Nous sommes à N’Djamena au Tchad. Adam (Youssouf Djaoro), 55 ans, est le maître-nageur de la piscine d’un grand hôtel dirigé par une Chinoise. Dans la rue, on l’appelle « Champion », car il fut vainqueur d’une compétition de natation. Adam est un homme sans histoire, heureux de vivre. Il aime l’eau, il aime sa femme et il aime son fils de 20 ans à qui il a transmit sa passion pour la natation, et eux, le lui rendent bien. Il aime aussi écouter la radio et les nouvelles sont inquiétantes. Rebelles, attaques, forces gouvernementales sont les mots au contenu lointain qu’il entend tous les jours et qu’il se dépêche d’oublier une fois la radio éteinte.
Le bonheur d’Adam ne dure pas longtemps. L’hôtel rajeunit ses effectifs. Il perd son poste de maître-nageur au profit de son fils, Abdel (Diouc Koma), pour celui, moins prestigieux de gardien. Lorsqu’il voit le jeune et insouciant pavaner à la piscine ou sur sa moto en ville, Adam ne peut s’empêcher de rager. S’il est père, il est avant tout homme, donc, pécheur. Comme son homonyme le premier homme sur terre, il va céder à la tentation.
La guerre civile éclate. Le gouvernement demande aux populations un « effort de guerre ». Adam n’a pas d’argent à donner au chef du quartier (le Camerounais Emil Abossolo Mbo) qui le harcèle pour sa contribution. Mais il a son fils. Abdel sera enrôlé de force dans l’armée, pour combattre les rebelles qui avancent vers N’Djamena. Son fils parti, « Champion » retrouve sa piscine désertée par les clients. Mais il n’est pas heureux. Le remord ne lui laisse aucun répit. Dans la ville, des familles, baluchon sur la tête, fuient vers le Cameroun, qu’ils perçoivent comme un îlot de paix. Un périple que Mahamat-Saleh Haroun avait lui-même effectué à 18 ans, pour fuir la guerre civile au Tchad. Adam refuse de partir et en veut au chef du quartier de l’avoir encouragé à sacrifier son fils. Dans sa quête de la rédemption, il va enlever Abdel, blessé, dans un camp militaire. Mais Abdel ne reverra jamais sa maison. Il mourra en chemin, non sans avoir pardonné à son père à qui il laisse tout de même un petit-fils en gestation.
« Un homme qui crie » est une tragédie sèche. Le sable y est très présent, la peur aussi. On la voit dans les regards des gens, dans les pas pressés des refugiés, dans les rues vidées de N’Djamena. C’est le film d’un homme blessé qui, en silence, crie sa douleur face à la guerre, au silence de Dieu et aux contradictions de la vie. C’est un drame intime et familial devenu un drame humain.
Après le prix spécial du jury à Cannes en 2010, Mahamat-Saleh Haroun remportera-t-il le prestigieux Etalon d’or de Yennenga au Fespaco 2011 avec ce film en compétition dans la catégorie long métrage? En tout cas, « Un homme qui crie » a déjà reçu le prix de l’adhésion populaire. Pour chacune de ses projections, le cinéma Burkina a dû refuser l’entrée à des dizaines de cinéphiles, la salle étant comble.
Stéphanie Dongmo à Ouagadougou
Fiche technique
Titre : « Un homme qui crie »
Scénario et réalisation : Mahamat-Saleh Haroun
Format : 35 mm
Durée : 92 minutes
Année de sortie : 2010
Pays d'origine : Tchad, France, Belgique
Producteur délégué : Florence Stern
Co-production : Entre chien et loup et Goï Goï productions
Distribution : Youssouf Djaoro, Diouc Koma, Emil Abossolo M'Bo, Hadje Fatime N'Goua...
mercredi 2 mars 2011
Fespaco 2011 : Mahamat-Saleh Haroun parle de son cinéma
Ils sont venus nombreux, les aspirants cinéastes, à l’Institut supérieur de l’image et du son (Isis) de Ouagadougou lundi 28 février, pour prendre part à une master-class sur le thème « Problématique de la qualité de la mise en scène et de la direction d’acteur dans les films africains », organisée par Africalia, une association financée par la coopération belge. Mais ce qui a fait courir la centaine d’étudiants en cinéma, ce n’est pas tant le thème que le professeur de ce cours public : le journaliste et réalisateur Mahamat-Saleh Haroun, premier africain à remporter le prix du jury à Cannes en 2010 et second africain à être primé à ce festival avec « Un homme qui crie » (2010, 92mn), par ailleurs en compétition officielle au Festival panafricain au cinéma et de la télévision (Fespaco), dans la catégorie long métrage.
Pendant quatre heures, l’exigeant Mahamat-Saleh Haroun n’a pas cessé de se fâcher et de se réconcilier avec son public. Il a d’abord décrié le retard accusé par des étudiants, puis, il a failli s’arracher le peu de cheveux qu’il porte sur la tête lorsque des questions « mal venues » lui ont été posées, et il s’est carrément énervé quand des étudiants ont eu de la peine à lancer la projection d’un extrait de son film « Expectations » (2008, 28mn). Entre ces crises, le cinéaste que l’on dit anticonformiste a critiqué : « le cinéma africain est essentiellement caricatural ». Il en veut pour preuve la multitude de films qui condamne l’immigration des Africains, véhiculant ainsi la position des gouvernements du Nord. Et pourtant, selon lui, les Occidentaux ont dû aller à la conquête du monde pour se développer. Le cinéaste de 50 ans est de ceux-là qui ont du traverser les monts et les mers pour trouver leur voie. Fuyant la guerre civile au Tchad, il se retrouve au Cameroun en 1980, puis en Libye. Enfin, il migre vers la France où il vit encore aujourd’hui.
Sur la direction d’acteur, Mahamat-Saleh Haroun a affirmé qu’« on ne peut pas transmettre l’art de diriger les acteurs ». Néanmoins, il a partagé son expérience acquise après une dizaine de films : « Je laisse beaucoup de place à l’improvisation... Il est important que le cinéma se pose la question du drame intérieur. Pour moi, la meilleure mise en scène c’est celle qui disparaît complètement... S’il n’y a pas d’enjeux, il n’y a pas de films. Et comme disait Sacha Guitry, il n’y a pas de petit rôle, il n’y a que de petits comédiens ». Pour donc être un bon réalisateur, il a donné sa recette : « une bonne culture générale, le talent et l’imaginaire ». Le tout, accompagné de beaucoup de rigueur.
Mahamat-Saleh Haroun a terminé par une petite pique à l’endroit du Fespaco : « « En 41 ans, le Fespaco nous désespère avec son inorganisation et l’incompétence des gens qui y travaillent ». Il a conseillé aux étudiants de sortir des sentiers battus et de rêver grand. Avec cette dernière recommandation : « Je vous souhaite de ne pas avoir le syndrome camerounais », en l’occurrence, le laxisme.
Stéphanie Dongmo à Ouagadougou
mardi 1 mars 2011
Fespaco 2011 : La saga du royaume bambara de Ségou
L’histoire du royaume bambara de Ségou est devenue une légende. Plusieurs historiens ont essayé de la raconter, sous différentes versions avec pour dénominateurs communs le drame et le merveilleux. L’écrivaine guadeloupéenne Maryse Condé avait déjà écrit la chute de Ségou dans un roman éponyme. Boubacar Sidibé, lui, a choisi de remonter à sa genèse dans une série télévisée de trois saisons de 21 épisodes de 26 minutes, « Les rois de Ségou », produit par l’Office de radio télévision du Mali (ORTM), Brico-films et Sarama films. La série écrite et réalisée par Boubacar Sidibé brosse, sur 105 années, l’histoire des quatre rois qui ont conduit Ségou à son apogée : Biton, N’Golo, Monzon et Da.
L’intrigue de la première saison nous plonge dans un village malien du 18ème siècle. Par une suite d’heureux hasards, Biton Coulibaly, un paisible chasseur, se voit intronisé comme chef du village, pour le protéger des brigands. Devenu puissant grâce aux djinns, il déjoue les intrigues de ses ennemis. Si les hommes ont le beau rôle dans cette série, les femmes ne sont pas moins présentes et, surtout, manipulatrices. Au point où Boubacar Sidibé fait dire à l’un de ses personnages : « Jamais l’homme ne peut cerner les multiples facettes de la femme ». L’humour féroce de Sidibé permet de rafraîchir cette série historique. C’est le cas notamment lorsque, dans le premier épisode, un mari détale à l’arrivée de brigands en abandonnant sa femme. Ici, rien n’a été laissé au hasard : les décors naturels ou implantés sont grandioses, les gros plans que le réalisateur a privilégiés permettent de saisir l’expression des personnages dans une société où le silence est d’or. La série est honorablement portée par ses acteurs, notamment Kary B. Coulibaly, superbe dans le rôle du griot dans lequel il avait déjà excellé dans « Dou » du même réalisateur. Une série dans laquelle Boubacar Sidibé a largement puisé les acteurs de « Les rois de Ségou », les comédiens sachant jouer en français ne courant pas les rues au Mali, d’après ses explications.
Pour combler les non-dits de l’histoire et la faiblesse des résultats de la recherche documentaire qu’il a menée pendant un an, Boubacar Sidibé a mis en marche son imagination, avec plus ou moins de bonheur. Ainsi, de longs faux ongles ont été placés sur les doigts des djinns, au risque de frôler le grotesque et la caricature. Les Rois de Ségou en s’intéressant à l’Histoire inaugure un genre nouveau dans les séries TV africaines. Pour le réalisateur, le passé permet de mieux appréhender le futur.
Cette série est en compétition dans la catégorie Fiction T.V à ce 22ème Fespaco. Par le passé, Boubacar Sidibé avait remporté deux prix au Fespaco : meilleur film de fiction Tv en 2001 avec « Séko » et en 2003 avec « Sanoudje ».
Stéphanie Dongmo à Ouagadougou