jeudi 15 décembre 2011

Vangdar Dorsouma : «Les festivals africains financés à 90% par l’extérieurs»

Le président tchadien de l’Association des festivals de théâtre de l’Afrique centrale (Aftac) fait l’état des lieux de ces évènements dans le cadre de la 19ème édition des Rencontres théâtrales internationales (Retic), du 09 au 14 décembre 2011 à Yaoundé.

  
Quelle est la situation des festivals de théâtre en Afrique centrale ?
Dans la sous-région, nous avons plus de 20 festivals de théâtre, dont la moitié au Cameroun. Il y a aussi un nombre important à Kinshasa et trois au Tchad. En Afrique centrale, la situation des festivals de théâtre est déplorable : on n’a pas assez d’espace de diffusion, très peu de salles, il manque un réseau de distribution des spectacles. Seuls les festivals assurent quelque peu la circulation des œuvres. Mais ces festivals fonctionnent avec 90% de subventions extérieures. Ce que nous déplorons. Les autorités de la culture ne soutiennent pas les festivals comme nous le souhaitons. Nous attendons des Etats qu’ils interviennent financièrement pour aider à l’éclosion de l’art et du théâtre en Afrique centrale. 

Quelles sont les opportunités de financements étrangers?
En réalité, il y a très peu d’opportunités de financement aujourd’hui. L’Organisation internationale de la francophonie contribue à la circulation des artistes, mais c’est juste une contribution. L’organisation belge Africalia finance aussi dans certains pays. Il y a aussi la fondation Prince Claus et parfois l’Union européenne. Mais tous agissent dans les limites des moyens disponibles, et ce n’est pas donné à tout le monde d’avoir une subvention. Les institutions de la sous-région, comme la Cemac et la Béac, n’interviennent pas. L’Aftac va continuer le plaidoyer pour que ces institutions puissent soutenir l’art, comme c’est déjà le cas en Afrique de l’Ouest. 

Qu’en est-il des sponsors locaux ?
Au Tchad, par exemple, il n’y a pas de sponsors qui s’investissent dans le théâtre. Ils préfèrent la musique, car ce qu’ils recherchent, c’est une mobilisation de masse, et non une mobilisation des consciences. 

La multiplication des festivals n’est-elle pas un problème pour la recherche des fonds ?
La multiplication des festivals qui font la même chose n’est évidemment pas une bonne chose. Elle fait que les partenaires se posent des questions. Ils se demandent notamment qu’est-ce qui motive les porteurs de projets. Force est de constater que certains le font pour des raisons personnelles. Il faut qu’on soit sérieux avec les partenaires financiers pour gagner leur confiance. 

Quel est le taux de fréquentation des festivals de théâtre de la sous-région ?
Cette question nous interpelle à faire une étude sur le sujet, pour savoir pourquoi le public ne vient pas. Au Cameroun, par exemple, il y a un problème économique et d’insécurité. De plus, la télévision a amené beaucoup de possibilités de distraction à la maison. Il faut aussi se demander si le public n’a pas été déçu par la qualité des spectacles qui lui sont proposés, et si les journalistes culturels ont bien fait leur travail pour sensibiliser le public. Il faut une décentralisation des spectacles, il faut que nous trouvions comment amener le théâtre au public et surtout comment former le jeune public.  

Quelle est la durabilité de ces festivals ?
Très peu de festivals vivent au-delà de trois éditions. Ceci est dû à la situation économique difficile et au manque de compétence des directeurs de ces festivals. La majorité sont des comédiens et des metteurs en scène, qui se retrouvent parfois obligés de créer des plate-formes pour faire tourner les comédiens. C’est pourquoi, il faut que les festivals soient portés par une structure et non par des individus. 

Quelles solutions l’Aftac préconise-t-elle ?
Nous voulons arriver à harmoniser les dates des festivals, pour qu’ils ne se piétinent pas et pour permettre une bonne circulation des compagnies. Il faut aussi que nous arrivions à parler d’une même voix auprès des partenaires, faire le lobbying pour obtenir le financement pour les festivals. Nous pensons aussi qu’il faut qu’il y ait des espaces nationaux de diffusion des spectacles.

Quels sont les résultats de votre association en 5 ans d’existence?
L’Aftac a été créée en 2006, pendant les Rétic à Yaoundé. La difficulté que nous avons est que tous les membres ne sont pas représentés à nos réunions, le but étant de regrouper les responsables de festivals pour valoriser le travail de l’artiste. Nous avons eu des rencontres avec des partenaires, et nous comptons le plaidoyer.

Propos recueillis par Stéphanie Dongmo

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