dimanche 26 février 2012

Ali Damba : « Sans volonté politique, le cinéma va végéter »

Le directeur du Centre national de la cinématographie du Niger (CNCN) parle de la promotion du cinéma dans son pays, à l’occasion d’une réunion organisée à Cotonou les 17 et 18 janvier 2012 par le Cinéma numérique ambulant Afrique.

Ali Damba.
  
Comment se porte le cinéma au Niger ?
Le cinéma au Niger se porte assez bien. Je ne dis pas parfaitement bien puisqu’il y a un certain nombre de difficultés qui freinent la promotion du cinéma au Niger. Aujourd’hui, cinq à six films sortent par an. On est passé de quatre salles de cinéma à une seule salle à Niamey, qui ne tourne même pas à 100%. Toutes les autres salles ont été transformées pour d’autres activités. Les gens ne les fréquentaient plus et les films arrivaient avec du retard. Les salles de cinéma privées connaissaient beaucoup de difficultés d’exploitation et de gestion.
Les projections de films, ça coûte excessivement cher et le prix de la place ne peut pas, pour le moment, excéder 500 francs Cfa. Ce qui n’arrive pas à faire fonctionner les salles. Aujourd’hui, les activités cinématographiques ont été relancées au palais des congrès. Le Centre a été créé pour justement contribuer à la promotion du cinéma et créer les conditions d’une bonne gouvernance cinématographie.

Quelles sont les missions du Centre national de la cinématographie du Niger ?
Elles sont de deux ordres : la protection des intérêts des acteurs du cinéma et la gestion du secteur du cinéma et de la vidéographie. Notre pays a signé beaucoup d’accords pour la relance du cinéma et il a fallu créer une structure semi-autonome pour permettre de prendre en charge directement les activités du cinéma et ce qui a trait à son développement, notamment l’appui des partenaires techniques et financiers.

Le Niger a connu sa période de gloire en ce qui concerne le cinéma avec des cinéastes comme Oumarou Ganda, qui a reçu le premier Etalon d’or de Yennenga au Fespaco en 1972 pour son film « Le Wazzou polygame ». Que s’est-il passé après pour que le cinéma nigérien perde ses lettres de noblesse ?
Quand la volonté politique n’accompagne pas un secteur, c’est très difficile que ce secteur puisse s’épanouir dans la mesure où, dans nos pays, c’est l’Etat qui fait tout. Cette situation ne permet pas vraiment de prendre en charge des secteurs qui ne sont pas prioritaires dans la vision globale de l’Etat. C’est ce qui fait qu’il y a eu un blocage puisque, pour le gouvernement, le cinéma n’est pas une priorité. On alloue les subventions à d’autres secteurs qui sont dits prioritaires. Donc, le cinéma ne peut que végéter. La volonté politique a certainement dû manquer. Il y  a aussi que les professionnels de ce secteur ne se sont pas organisés correctement pour faire marcher leurs activités. La rhétorique financière qui consiste à dire qu’on n’a pas les moyens me choque énormément. Je pense que les moyens ne peuvent venir que si les gens croient en ce qu’ils font et s’ils pensent à mettre en place une organisation digne de ce nom pour leur permettre de réussir ce qu’ils font. Les cinéastes s’attendent toujours à ce que ce soit l’Etat qui donne de l’argent pour les aider. Ca ne pourra pas marcher ainsi. 

Y a-t-il aujourd’hui une véritable volonté politique de relance du cinéma au Niger ?
Oui, bien plus que les années antérieures, puisque l’Etat a décidé de créer cet établissement public à caractère professionnel [le CNCN, Ndlr]. Il y a aussi eu une ordonnance qui régularise tous les métiers du cinéma et de la vidéo, et on a tout l’arsenal juridique en place pour pouvoir mener à bien nos activités. Pour le développement du secteur du cinéma, il y a un fond national est en train d’être créé avec le ministère de la Culture et  le ministère des Finances pour l’alimenter.
Propos recueillis par Stéphanie Dongmo

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